Christian Puren, dans son intervention au colloque de Rome, a remis dans une perspective historique ce qu’il appelle les « logiques documentaires ». Il en existe plusieurs en effet, chacune consistant en un modèle d’approche et de traitement différents du document selon la méthodologie à laquelle elle se rattache.
Dans la première méthodologie qui nous intéresse ici, parce qu’elle peut toujours être pertinente, la « méthodologie active » des années 1920-1960 en France, la logique qui s’impose est la « logique document » : la base est le texte à partir duquel les apprenants vont extraire de nouvelles connaissances langagières et culturelles, et à propos duquel, au cours du commentaire oral en classe, ils vont mobiliser leurs connaissances langagières et culturelles déjà acquises.
Il s’agit là d’un dispositif dit d’ « intégration didactique maximale », dans lequel toutes les activités se réalisent à partir et à propos du texte unique, considéré comme « authentique » parce que représentatif de la langue et de la culture étrangères. Comme le déclare en 1902 un des grands méthodologues directs, Adrien Godard :
Dans ce double travail stylistique et grammatical, l'activité de l'élève est concentrée sur le texte, qui se fixe profondément dans sa mémoire. La lecture devient en même temps que le but, l'instrument principal de l'enseignement et ainsi se réalise, par l'explication des textes, cette collaboration mutuelle de tous les exercices et cette concentration du travail, qui doit être la loi de tout enseignement.[1]
Quelques années plus tard, les auteurs d’un manuel d’espagnol présentent ainsi l’intérêt de leur ouvrage :
Pratiqué d’une façon active, l’enseignement par les textes est le plus fécond, le plus complet. Lui seul met en pleine lumière les mille particularités d’une langue et les rend familières grâce à une gamme d’exercices très étendue : explication ; lecture d’ensemble du texte ; traduction claire et courageuse ; thème, résumé ou récit ; transposition ou imitation ; discussion d’idées ou commentaire. […] Guidés par les auteurs les plus célèbres, les élèves pénétreront dans l’intimité de la langue sans contrainte, sans ennui, car, même dans les extraits, palpite la vie, la profonde réalité des grandes œuvres.[2]